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“Le Fils de Jean”: Après “L’Inconnu du Lac”, Pierre Deladonchamps dans le nouveau Philippe Lioret

“Le Fils de Jean”: Après “L’Inconnu du Lac”, Pierre Deladonchamps dans le nouveau Philippe Lioret

29 August 2016 | PAR Gregory Marouze

Après avoir adapté au cinéma des œuvres littéraires de Olivier Adam et Emmanuel Carrère, c’est sur Jean-Paul Dubois que Philippe Lioret a jeté son dévolu. Voici cinq ans que nous n’avions eus de nouvelles de ce cinéaste talentueux. Alors, que vaut Le Fils de Jean, le dernier long-métrage du réalisateur de Mademoiselle, Je vais bien, Ne t’en fais pas et Welcome ? Toute la Culture vous apporte la réponse…

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Est-ce parce que Philippe Lioret fut longtemps au service des autres – il fut ingénieur du son pour Claude Goretta, Robert Altman, ou Michel Deville, excusez du peu – que ce cinéaste se montre si discret? *

On émettra une hypothèse : voilà un réalisateur qui, à l’image des grands anciens du cinéma français, se met tout entier au service des histoires qu’il raconte et, surtout, des comédien(ne)s qu’il filme. Pour s’en convaincre, il faut revoir L’Équipier, dont la beauté rappelle le cinéma de Jean Grémillon.

Lioret, en explorant différents genres, a traité dans son cinéma des questions essentielles souvent liées aux inégalités sociales. Qu’on se souvienne de Tombés du Ciel (sur un personnage qui inspirera par le suite Spielberg avec Le Terminal), Welcome (sur les migrants) et Toutes nos envies (sur le surendettement).

Le Fils de Jean  7

Mais comme Loiret est pudique, il aborde ces thèmes forts par le biais d’œuvres romanesques, en adaptant régulièrement les autres.
Un thème qui revient souvent dans la filmographie de Lioret est la quête d’identité. C’était le moteur du personnage incarné par Mélanie Laurent dans Je vais bien, Ne t’en fais pas. C’est de nouveau la recherche identitaire qui motive Mathieu (interprété par Pierre Deladonchamps) dans Le Fils de Jean.

Nous en dévoilerons peu sur l’histoire du film. Tout juste dirons-nous qu’elle mènera Mathieu jusqu’au Canada, à la découverte d’êtres qui ne sont pas forcément ceux qu’il pense deviner ou espère rencontrer.

Le Fils de Jean est la deuxième adaptation d’une œuvre de Jean-Paul Dubois en quelques mois. Mais contrairement à Thomas Vincent avec La Nouvelle vie de Paul Sneijder, Lioret fait le choix d’une adaptation plus libre. On ne comparera pas Le Fils de Jean avec le roman dont il est inspiré: Si ce livre pouvait me rapprocher de toi. D’autant qu’il est un peu stupide de le faire, tant littérature et cinéma sont deux moyens d’expression forts différents.
En s’appropriant l’histoire d’origine et en la faisant sienne, Lioret fait un choix tout à fait honorable. Comme à son habitude, il s’intéresse avant tout aux personnages qu’il a devant son objectif. Il soigne tout particulièrement les dialogues, les attitudes, les petits gestes et regards.

Si, après L’Inconnu du Lac, Pierre Deladonchamps s’impose comme un grand acteur du cinéma français (on va le revoir prochainement dans Eternité de Tran Anh Hung), il faut dire que le bonheur du film est chez ses personnages secondaires. On notera la présence de Gabriel Arcand, époustouflant dans le rôle de Pierre, médecin bourru et énigmatique. Arcand fait évoluer son personnage constamment, passant d’une humeur à une autre, et sans aucun cabotinage. Du grand Art !
Quant à Catherine de Léan et Marie-Thérèse Fortin, elles imposent une forte présence dans un film à l’univers assez masculin.

Si Le Fils de Jean connaît un ventre creux vers la moitié du métrage, il n’en demeure pas moins un joli film, qui a le bon goût de proposer du cinéma à l ‘écriture, l’interprétation et la réalisation solides.

N’oublions pas de citer également la beauté des paysages canadiens, que Lioret évite de filmer comme des photos de dépliants touristiques.

Avec Le Fils de Jean, Philippe Lioret poursuit son parcours de façon personnelle et sans se compromettre.

Grégory Marouzé

* On peut voir ici la leçon de cinéma de Philippe Lioret, animée par Michel Ciment au Arras Film Festival en 2013.

Le Fils de Jean
Avec Pierre DELADONCHAMPS et Gabriel ARCAND
Réalisation Philippe Lioret
Scénario Philippe Lioret, avec la collaboration de Nathalie Carter
Directeur de la photographie Philippe Guilbert
Montage Andréa Sedlackova

Durée 98 min Sortie le 31 août 2016

Synopsis officiel : À trente-cinq ans, Mathieu ne sait pas qui est son père. Un matin, un appel téléphonique lui apprend que celui-ci était canadien et qu’il vient de mourir. Découvrant aussi qu’il a deux frères, Mathieu décide d’aller à l’enterrement pour les rencontrer. Mais, à Montréal, personne n’a connaissance de son existence ni ne veut la connaître. Il se retrouve en territoire hostile.

Visuels: © Le Pacte

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Gregory Marouze
Cinéphile acharné ouvert à tous les cinémas, genres, nationalités et époques. Journaliste et critique de cinéma (émission TV Ci Né Ma - L'Agence Ciné, Revus et Corrigés, Lille La Nuit.Com, ...), programmation et animation de ciné-clubs à Lille et Arras (Mes Films de Chevet, La Class' Ciné) avec l'association Plan Séquence, Animateur de débats et masterclass (Arras Film Festival, Poitiers Film Festival, divers cinémas), formateur. Membre du Syndicat Français de la Critique de Cinéma, juré du Prix du Premier Long-Métrage français et étranger des Prix de la Critique 2019, réalisateur du documentaire "Alain Corneau, du noir au bleu" (production Les Films du Cyclope, Studio Canal, Ciné +)

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