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[Critique] « 12 years a slave » : un “grand” film sur l’esclavage (et 9 nominations aux Oscars)

[Critique] « 12 years a slave » : un “grand” film sur l’esclavage (et 9 nominations aux Oscars)

22 January 2014 | PAR Gilles Herail

12 years a slave est meilleur que prévu. On s’attendait à un film à Oscars pompeux mais si Steve McQueen n’évite pas les maladresses et les lourdeurs, il réalise malgré tout le film le plus abouti et le plus fort sur l’esclavage et l’injustice. Synopsis officiel: Les États-Unis, quelques années avant la guerre de Sécession. Solomon Northup, jeune homme noir originaire de l’État de New York, est enlevé et vendu comme esclave. Face à la cruauté d’un propriétaire de plantation de coton, Solomon se bat pour rester en vie et garder sa dignité. Douze ans plus tard, il va croiser un abolitionniste canadien et cette rencontre va changer sa vie…

[rating=3]

 

 

 

 

12 years a slave arrive auréolé de ses nominations aux Oscars et de sa bonne réputation qui est labellisée “film historique inattaquable”. Et on peut pourtant reprocher à Steve McQueen de nombreuses choses. Des détails symboliques très appuyés, des choix de mise en scène parfois trop réfléchis et qui ne collent pas au sujet. L’étalage de stars venues chercher la performance au détriment de la crédibilité de leurs personnages (Brad Pitt notamment qui apprécie de plus en plus de jouer le sauveur quasi christique ou Paul Dana qui en rajoute et se caricature en méchant complexé par sa taille). L’acteur principal, souvent très bon, déclame parfois un peu trop des dialogues trop écrits et censés donner un sens et une vision plus larges au film. 12 years a slave n’est pas un chef d’oeuvre mais a le mérite de dévoiler une histoire humaine incroyable et une période de transition oubliée entre esclavage et abolition. Car la force du récit vient de cette situation inconcevable.

Un homme né libre, noir, vivant avec sa famille à New-York, enlevé et vendu comme esclave dans le Sud, sans espoir de libération et au mépris de ses droits les plus élémentaires. Attendant l’opportunité de pouvoir écrire une lettre à ses amis et ainsi faire venir les autorités compétentes confirmant son identité et invalidant l’acte de propriété du maître incarné par Michael Fassbender. Au delà du film documentaire sur les plantations, les humiliations, la violence et l’horreur de l’esclavage (où la froideur de la réalisation donne encore plus de poids), le film évoque donc d’autres questions et va plus loin. En montrant le racisme et le mépris que certains affranchis éprouvent pour les esclaves, habitués à servir et incapables de se révolter. En montrant le pire de l’espèce humaine et la folie des esclavagistes (Fassbender) mais aussi les petites lâchetés aux conséquences tragiques sur la vie de Solomon. Dans une période où l’esclavage n’est plus autant une évidence et où l’on fait semblant de ne pas savoir ou de ne pas pouvoir aider pour mieux protéger ses intérêts (Benedict Cumberbatch).

Sans occulter la violence, 12 years a slave n’est pas voyeur. Il expose, ne laisse pas ciller la caméra quand il le faut mais ne se complaît pas dans l’horreur. Le scénario réserve aussi des thématiques intéressantes, qu’il aurait peut être fallu fouiller. La rencontre surréaliste d’un groupe d’esclaves avec des Indiens d’Amérique qui reste comme un songe poétique sans être exploitée. Mais aussi la complexité des questions de classe et de race. Quand des ouvriers blancs rejoignent l’équipe d’esclaves en tant que journaliers mal payés. Dormant avec les esclaves. Cassant la frontière entre les races mais restant un niveau au dessus. 12 years a slave fait donc un travail de mémoire remarquable et nécessaire en proposant ce film comme sur l’esclavage mais aussi sur l’injustice et le combat plus universel pour la liberté et contre l’injustice. Émouvant, choquant, marquant et plutôt fin, le film ne mérite pas ses oscars mais reste incontournable en cette rentrée cinématographique.

Gilles Hérail

 12 years a slave, un drame historique américain de Steve McQueen avec Chiwetel Ejiofor, Michael Fassbender et Brad Pitt, sortie le 22 janvier 2013, durée 2h13

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