Arts
Voyages à la maison de l’Amérique Latine

Voyages à la maison de l’Amérique Latine

09 February 2012 | PAR Sandrine et Igor Weislinger

La Maison de L’ Amérique Latine nous offre actuellement deux beaux voyages.

Au rez-de-chaussée, nous pouvons découvrir la vie du vénézuélien, Francisco de Miranda, le premier homme qui s’engagea en faveur de l’indépendance des colonies. Miranda (1750-1816) surnommé El Precursor ou El Gran Americano Universal fut avant tout un grand officier, un homme de tous les fronts qui a combattu aussi bien dans l’armée française que dans l’armée espagnole que dans l’armée russe et a même failli fini un temps à la tête du Vénézuela.

Ce n’est toutefois pas à son passé d’officier complexe et glorieux (il a son nom gravé sous les voûtes de l’Arc de Triomphe de l’Etoile) que s’attache cette exposition. Elle nous permet de découvrir la modernité d’un homme qui s’est battu pour l’indépendance des colonies espagnoles en Amérique, un homme qui passera une partie de sa vie en prison pour avoir été anticolonialiste avant l’heure.

La présentation que nous en fait la maison de l’Amérique Latine répond à l’actualité du personnage par des techniques dernier cri, un ordinateur tactile offre aux visiteurs la possibilité de découvrir par eux-mêmes les informations sur Miranda, un vidéoprojecteur permet de voir le monde tel qu’il était à son époque, des portraits de lui sont reproduits sur les murs tandis qu’en vitrine, des manuscrits nous replongent dans ce passé complexe. Un petit livret joint à l’exposition permet heureusement de comprendre dans la globalité cet étrange Miranda qui, un peu à la manière du Pantagruel de Rabelais, étudie le monde afin d’en tirer un enseignement et de faire le bonheur des peuples à commencer par le sien. Ce but louable n’aboutira hélas jamais. Jugé anarchiste et dangereux, il est fait prisonnier sur ordre du gouvernement espagnol qui craint qu’il ne complote une révolution dans ses colonies avec l’appui d’autres puissances. Romantique et néo classique, un homme passionnant dont il est difficile encore de nos jours de cerner toute la personnalité à moins d’avoir accès à son fameux journal intime: 63 tomes.

Toujours sur le thème du voyage, au sous-sol, ce sont des parcours contemporains que les artistes nous proposent. Jungle Studio de Pauline Bastard nous fait plonger à travers l’œilleton d’une caméra dans les feuilles des plantes pour nous faire voir des insectes qui évoluent mais pas dans ces dernières. Elle nous met en garde avec ses œuvres (de faux appareils sur un mur également) contre la fausseté des représentations. Ce que nous croyons voir n’est pas la réalité. Regarder la nature n’est pas la voir à travers un écran. Une manière de nous dire qu’aucune image n’est comparable à un voyage, qu’il faut observer par soi-même. Alberto Baraya avec Herbarium nous met face à une immense peau caoutchoutée pour nous faire réfléchir sur la maltraitance subie par les arbres pour le commerce du caoutchouc et sur la fausse nature: les arbres en plastique à l’air réel made in China qui font fureur depuis quelques années: du vrai, on obtient du faux et du faux, on tue le vrai. Baraya dresse une critique pertinente  des violences que subit la nature: il appuie son propos en montrant des tirs dans une eau calme et sereine.

L’œuvre de Francis Alÿs est également très forte en sens et nous touche particulièrement: cet artiste qui vit au Mexique a pris la décision pour se rendre aux Etats-Unis et d’illustrer la difficulté qu’ont les mexicains à passer la frontière des Etats-Unis, passage très aisé en comparaison pour un américain désireux de se rendre au Mexique, en faisant tout le tour du globe, en prenant autant de billets d’avion que nécessaire, il est ainsi allé de Tijuana à San Diego en voyageant du 1er juin au 5 juillet 1997, nous pouvons voir son parcours sur une carte postale que nous pouvons remmener avec nous. Enfin, parmi d’autres œuvres intéressantes que vous pourrez découvrir par vous-même, nous avons vu un rapport entre celle d’Ana Gallardo et les voyages de Miranda. Ce dernier a fait le tour du monde pour offrir à son pays natal, le Venezuela, une liberté nouvelle. Il voulait revenir dans son pays différent de lorsqu’il en était parti. L’oncle d’Ana aussi et comme lui, il a échoué dans ce retour qui est celui souhaité par des millions d’immigrés partout dans le monde, qui aspirent à finir un jour leur vie sur leur terre natale, y revenir en quelque sorte victorieux. L’oncle d’Ana ne s’est pas senti de faire ce voyage vers ses sources alors Ana a amené ses sources à lui en filmant les lieux qui étaient chers à son oncle, une œuvre touchante qui s’inscrit dans la mémoire et l’amour filial.

Tous ces voyages posent aussi la question de la nostalgie de l’ailleurs, venez faire un beau voyage spirituel à la Maison de l’Amérique Latine.

Compagnie Mi-Octobre, Serge Ricci et Fabien Almakiewicz : Au bord de l’oubli & Là où rien du cœur ne se perd
Elizabeth Olsen, égérie d’ASOS
Sandrine et Igor Weislinger

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