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L’Afrique contemporaine s’affirme fièrement à Art Paris Art Fair

L’Afrique contemporaine s’affirme fièrement à Art Paris Art Fair

Après la Corée du Sud en 2016, la foire d’art contemporain Art Paris Art Fair met la capitale à l’heure africaine pour sa 19e édition. Loin des clichés et de l’exotisme, c’est une Afrique plurielle, libre et ouverte sur le monde qui est dévoilée pour la première fois au grand public. Parmi les 139 exposants, une trentaine de galeries d’Afrique ou d’ailleurs exposent une nouvelle génération d’artistes africains, longtemps négligés, qui s’imposent progressivement sur la scène artistique mondiale.

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Il était temps ! Après l’engouement de ces dernières années pour l’art asiatique et moyen-oriental, le marché en quête de renouvellement et de nouveauté se tourne progressivement vers un continent dont tout reste encore à découvrir. Sous la houlette de Marie-Ann Yemsi, le pendant plus accessible et grand public de la FIAC qu’est Art Paris Art Fair, s’intéresse aux artistes émergents du continent africain. En faisant découvrir au grand public une nouvelle génération d’artistes africains, Art Paris Art Fair ouvre la voie à un nouveau marché et permet aux jeunes collectionneurs d’acquérir des œuvres dont la cote devrait monter dans les prochaines années. Vingt galeries, dont onze venues d’Afrique, ont joué le jeu en réservant leurs espaces à ce « Focus Afrique ». Les œuvres d’une centaine d’artistes africains sont ainsi dispersées dans toute la foire.

Les stars africaines contemporaines rayonnent

Parmi la centaine d’artistes africains exposés, les plus connus ont répondu présents. Sous la nef, les toiles colorées de Chéri Samba (galerie Magnin-A) côtoient ainsi les tirages argentiques noir et blanc de Seydou Keïta (galerie Nathalie Obadia) et les peintures foisonnantes d’Omar Ba (galerie Daniel Templon). La galerie Afronova de Johannesburg consacre quant à elle son entier espace à l’artiste Billie Zangewa, dont les tableaux-tapisseries réalisés à l’aide de chutes de tissus et de soies, évoquent les compositions colorées et impersonnelles de David Hockney ou autres maîtres du pop art. La galerie londonienne présente enfin l’immense installation d’El Anatsui, connu pour ses œuvres tissées faites à partir de capsules de bouteilles de bière, aux jeux de lumière et effets de reliefs multiples.

Mais à côté de ces artistes déjà bien installés sur la scène artistique internationale, la foire révèle de l’art africain quelques figures émergentes talentueuses. Cinq photographes ont particulièrement attiré notre attention…

Les photographes interrogent l’identité africaine

Coup de cœur de cette édition : l’Imaginary Trip de la jeune artiste congolaise Gosette Lubondo. Exposée à la galerie L’Agence à Paris, elle tente de redonner vie au réseau ferroviaire congolais abandonné depuis le départ des belges lors de l’accession à l’indépendance en 1960. Dans les locaux déshérités, elle saisit ses modèles qui déjà disparaissent. Un même rapport au temps se dégage dans les photographies poignantes en noir et blanc de Mohau Modisakeng qui habitent l’espace de la galerie sud-africaine Whatiftheworld. Immobiles ou arrêtés dans leur mouvement, ses modèles paraissent avoir été sculptés, comme suspendus dans le temps – celui de la mémoire. Enterré sous les gravats, le corps immobile symbolise avec poésie les crimes de l’apartheid et devient un marqueur de l’histoire.

En face, la galerie parisienne Baudoin Lebon expose les photographies de l’américaine Ayana V. Jackson qui explore les multiples identités africaines. Avec des portraits évoquant les grands classiques de la peinture occidentale, de Vermeer à Ingres, elle dénonce l’image faussée de la femme africaine que véhiculèrent les photographies coloniales des XIXe et XXe siècle à travers des scénographies fictives.

Plus loin au stand Ed Cross Fine Art, les enfants que Mário Macilau photographie dans sa série « Growing in Darkness » témoignent des trafics et de la pauvreté dont les mineurs sont les premières victimes. On retient surtout le jeune garçon au regard saisissant, un pistolet à la main : sorte de double de l’artiste, lui-même enfant de la rue de Maputo au Mozambique.

Enfin, la galerie Art Twenty One, qui a fait le voyage depuis la capitale nigériane, présente les photographies originales de Namsa Leuba. On y aperçoit des enfants, avec un maquillage et des vêtements cérémoniels, juchés sur des troncs d’arbre à la manière de fétiches. A la limite du sacrilège pour certains, l’artiste engage un dialogue avec ses origines. En intégrant ses fétiches dans une composition occidentale, elle tente d’unir les deux identités en créant un syncrétisme culturel.

En dévoilant une nouvelle génération d’artistes prometteurs qui créent en toute autonomie, la foire évite avec succès l’écueil de l’exotisme et montre une Afrique contemporaine, ouverte sur le monde, qui acquiert une place grandissante sur la scène artistique internationale. Avec des galeries issues de 29 pays, et une création africaine qui efface les frontières, Art Paris Art Fair sort finalement des exceptions nationales pour imposer un art mondial.

Visuels :

Namsa Leuba, Patience, from the series Zulu Kids, 2014 © Namsa Leuba, galerie Art Twenty One

Gossette Lubondo Imaginary Trip, 2016, photographie, 50 x 75 cm © L’Agence à Paris

Mohau Modisakeng Lefa 2 II, 2016, photographie 170 x 150 cm © Whatiftheworld, Cape Town

Ayana V. Jackson, TFB, 2017, photographie, 80 x 100 cm © Baudoin Lebon

Mario Macilau, Boy with his toy pistol, Growing in Darkness series, 2015, photographie, 80 x 120 x 10 cm © Ed Cross Fine Art

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DIANE ZORZI DU MAGAZINE DES ENCHÈRES

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