Arts
Frank Gehry au Centre Pompidou : première grande rétrospective en Europe

Frank Gehry au Centre Pompidou : première grande rétrospective en Europe

06 October 2014 | PAR Géraldine Bretault

Surtout connu en Europe pour son paquebot d’acier amarré à Bilbao depuis 1997, Frank Gehry se voit offrir les cimaises de la galerie Sud du Centre Pompidou pour venir nous raconter la genèse de sa réflexion en architecture.

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L’exposition Frank Gehry pourrait avoir pour sous-titre “ou comment présenter l’architecture au musée”, tant la réponse apportée par les commissaires Frédéric Migayrou et Aurélien Lemonier est lumineuse et didactique. La tentation aurait été de faire de la galerie Sud un bel objet Gehry, une enveloppe “carpe” par exemple, pour reprendre la forme de son poisson fétiche. Or ils en conviennent eux-mêmes, c’eut été desservir le propos, qui vise à resituer le travail de l’architecte américain dans son contexte d’origine : un urbaniste de Los Angeles marqué par ce territoire, et gagné peu à peu par une obsession de l’espace interstitiel, plus encore que par les fameuses courbes spectaculaires qui coiffent ses réalisations.

Une présentation chronologique n’aurait sans doute pas permis de montrer toute la richesse expérimentale du travail de Gehry, d’autant que la complexité de mise en œuvre de ses projets brouille les pistes au niveau du calendrier : ainsi, un bâtiment clé comme le Disney Hall à Los Angeles downtown a été commandé avant le Guggenheim Bilbao, mais livré ensuite, au terme de quinze ans de travaux.

Les commissaires ont donc choisi de rompre  avec la notion de chronologie pour classer les réalisations de l’architecte en 6 grands pôles thématiques – Composition-assemblage, Fusion-interaction, – Tension-conflit, Continuité-flux, Singularité-unité -, qui entrent en interaction grâce aux fenêtres ménagées entre eux par l’emploi de cloisons brisées, en diagonale, autre élément phare du vocabulaire de Gehry. L’espace central ainsi dégagé permet d’explorer deux notions transversales de son travail : l’ancrage dans une réflexion urbanistique visant la requalification de quartiers déindustrialisés (comme à Bilbao), et le “computationnel”, ou la manière dont Gehry s’est approprié le nouvel outil informatique pour imaginer ses enveloppes folles.

Et ça marche : contre toute attente, l’exposition se révèle d’une grande clarté, les questions plus théoriques étant réservées aux pages du catalogue. Ce que les commissaires voulaient à tout prix mettre en avant, c’est le travail au contraire très manuel de l’architecte, pour qui l’ordinateur n’a jamais été qu’un outil et sûrement pas une fin : les maquettes choisies sont des maquettes d’étude, et laissent voir toute la manipulation ingénieuse qui a permis aux collaborateurs de Gehy de faire tenir telle bande de papier ou tel morceau de tissu en équilibre avec trois points de colle… Du cerveau de Gehry, l’idée passe directement à la main à travers ses célèbres esquisses gribouillées, et ensuite à la maquette, bien avant la computation par logiciel. Ce qui redonne son aspect artisanal à l’architure, vue comme un chantier permanent, dans un parcours enrichi de nombreux diaporamas et vidéos, avec une grande interview de l’architecte en préambule.

À l’heure où la fondation Louis Vuitton s’apprête à ouvrir ses portes, l’occasion de faire le point sur une œuvre phare de la seconde moitié du XXe siècle.

Visuels :

Frederick R. Weisman Art and Teaching Museum, 1990-1993, 2000-2011 © Don F. WongGuggenheim Museum Bilbao, 1991-1997 © Philippe Migeat, Centre Pompidou
Agence Chiat/Day, 1985-1991 © Grand Mudford
DZ Bank Building, 1995-2001 © Roland Halbe
Hotel Marqués de Riscal, 1999, 2006 © Thomas Mayer

Infos pratiques

Les Cygnes
Théâtre du Palais Royal
centrepompidou

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