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Récit de la performance de Chad Taylor chez Rosa Barba au CAPC de Bordeaux

Récit de la performance de Chad Taylor chez Rosa Barba au CAPC de Bordeaux

02 December 2016 | PAR Maïlys Celeux-Lanval

Le CAPC, musée d’art contemporain de Bordeaux, a accueilli un grand vernissage public de son exposition consacrée à Rosa Barba le jeudi 17 novembre 2016 : ouvertes à partir de 19 heures, les portes ont vu passer une très jolie foule de jeunes gens à la mode venus se plonger dans l’obscurité de la grande Nef, entièrement investie par Rosa Barba, et écouter un solo de batterie de Chad Taylor, avant d’enchaîner sur un DJ set de Laetitia Sadier. Lancement somptueux d’une expo électrisante, ce vernissage captivant vaut le coup d’être raconté.

CAPC de Bordeaux

Nous y avions passé une partie de l’après-midi, loin du ciel blanc de l’automne. Sous les gigantesques arcades de la Nef du CAPC, l’artiste contemporaine Rosa Barba a installé De la source au poème, une série d’œuvres, d’installations de verre et de projections analogiques dont tout le chic est de fonctionner par flashs de lumière. Représentant des paysages industriels et des extraits de décomptes cinématographiques, ses films ne se comprennent pas immédiatement et demeurent opaques, mystérieux, épais comme un brouillard, selon sa volonté de donner à voir une réflexion quasi-illisible, les textes eux-mêmes s’effaçant au fil de leur affichage. Le montage anarchique des images dialogue avec une lumière vacillante, qui éblouit puis plonge dans le noir, le tout accordé à divers bruits plus ou moins harmonieux. Instinctivement, le spectateur se balade dans cette installation gigantesque comme s’il cherchait quelque chose : il regarde, se retourne, se perd, esquisse quelques pas autour d’une plaque de verre colorée. Plongé dans l’obscurité rythmique de Rosa Barba, il est empêché et stimulé tout à la fois, il ne comprend pas tout mais s’approprie le paysage de l’œuvre.

Ainsi, pour inaugurer cette exposition, la musique était le meilleur choix possible, elle qui sait si bien stimuler l’imagination de chacun. L’historien du jazz et musicien Chad Taylor est donc arrivé ce jeudi 17 novembre à 20 heures dans un coin de la Nef, s’est assis devant une batterie et s’est lancé dans un spectaculaire solo qui a fait trembler les hauts murs du musée. Éclairé avec parcimonie et aveuglé d’éclats de lumière intempestifs, souvent plongé dans le noir, l’homme a permis d’activer l’orchestration des quatre projecteurs 16mm et du projecteur 35mm qui animent l’exposition. Difficile de décrire fidèlement la puissance quasi-primitive de ces trois quarts d’heure de batterie ininterrompus ; en chacun montait la fièvre des percussions et c’est presque en dansant autour d’un grand feu qu’on aurait eu envie de recevoir cette étonnante performance musicale. Venaient à l’esprit l’artiste contemporain Céleste Boursier-Mougenot pour l’aspect ultra-sensible de la batterie dont il a fait le cœur d’une de ses œuvres les plus poétiques, et le film américain Whiplash pour la soif gargantuesque de ce solo sans fin ; pourtant, étonnamment sage, le public ne bougeait pas, entièrement absorbé dans l’écoute. On a vu certains fermer les yeux, brutalisés par les flashs ou savourant la technique de Chad Taylor. Quand finalement, et sans crier gare, l’homme a lâché ses baguettes, s’est levé et est parti pour ne pas revenir, on s’est retrouvé seul face à cette sensation brûlante du rythme endiablé, et on repris la marche, vibrant de la musique intérieure de nos pas saccadés dans les paysages de Rosa Barba.

Informations pratiques :
Rosa Barba au CAPC de Bordeaux
Du 17 novembre 2016 au 26 mars 2017

Infos pratiques

Centre National Jean Moulin
Petites formes mouvantes et émouvantes
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