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Nîmes :  « Chorégraphies suspendues », les mémoires du Vietnam par 8 artistes au Carré d’Art

Nîmes : « Chorégraphies suspendues », les mémoires du Vietnam par 8 artistes au Carré d’Art

22 March 2014 | PAR Yaël Hirsch

Jusqu’au 27 avril, dans la cadre de l’année “France Vietnam”, le Carré d’Art de Nîmes présente au deuxième étage l’exposition temporaire Chorégraphies suspendues. Un voyage multimédia et à contre-courant des clichés sur les mémoires du Vietnam, vues par 8 artistes du pays.

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Loin des clichés sur la culpabilité ou la nostalgie coloniale, l’exposition Chorégraphies suspendues propose de redécouvrir l’histoire et les mémoires du Vietnam, ainsi que leurs échos contemporains à travers les œuvres de 8 artistes du pays. Dans un espace qui ouvre grandes les écoutilles à la liberté d’expression, le résultat est à la fois vivant, émouvant et monumental.
On entre dans l’exposition par un bling bling postcommuniste, une grande sculpture dorée de Lenine, allongée sur le côté comme un Brancusi. L’œuvre de The Propeller Group s’appelle Monumental Bling et ouvre le bal avec à propos.

Poussant une lourde porte, on est saisi d’un bruit assourdissant, dont l’origine est masquée par une accumulation de meubles coloniaux à la Arman. L’œuvre, Barricade, est de Dihn Q Le, qui a lui-même fait partie des Boat-people et propose les installations les plus bouleversantes sur la question de la mémoire. Dans la salle suivante, Erasure est une composition monumentale où un petit bureau d’archiviste semble survivre dans une mer de photos agitées qui a déjà détruit la coque d’un bateau. Faisant référence à l’arrivée triomphale du Capitaine Cook en Australie alors que les Boat People n’ont pas été bienvenus, l’œuvre est un projet d’archive en soi qui permet à ceux qui s’en sont sortis de retrouvér en lieu et place de la mer des photos de proches. Si un Vietnamien reconnaît un visage, il peut demander à récupérer la photo, après avoir vu le commissaire de l’exposition. L’oeuvre contient donc une véritable part d’archives à consulter en cliquant sur la page du Erasureproject.

Avec Nguyen Thai Tuan, on passe en deux dimensions, vers un art qui réfléchit entre expressionnisme et réalisme au devenir du pays à travers la peinture d’un lieu mythique : la résidence d’été du dernier empereur d’Indochine : Bao Dai.

Sur un mode plus urbain, Lena Bui et Neguyen Huy An travaillent avec les voix et les voies vietnamiennes de la signalisation cycliste ou festive… Vidéaste, Nguyen Trinh Tri fait du témoignage un art. Tiffany Chung revient aussi sur l’histoire du pays avec des œuvres puissantes comme Recettes de première nécessité où c’est ce qui n’est pas dit et pas montré qui est important.

Enfin, les vidéos de Jun Nguyen-Hatsusgiba interrogent les hiatus entre tradition et modernité.
Cette exposition sur l’histoire et la mémoire qui permettent de se positionner résonne fort avec l’accrochage actuel des collections permanentes : De la présence des lucioles, qui tente de montrer après Didi-Huberman que mêmes mortes, les lucioles brillent encore. On trouvera notamment le travail de Danh Vo sur la statue de la liberté, mémorial s’il en est, dans ces collections, ainsi que des œuvres de Penone, Sophie Calle, Thomas Schutte mais aussi des artistes locaux plein d’ « aura » à (re)découvrir : Suzanne Lafont ou Claude Viallat.

photos :
DINH Q LE, Erasure, capture d’écran, 2011. Commandé par Sherman Contemporary Art Foundation, Sydney, Australia
Courtesy de l’artiste. © Dinh Q Le
THE PROPELLER GROUP, Monumental Bling, 2013, croquis de l’artiste pour l’installation. Courtesy des artistes. © The Propeller Group
DINH Q LE, Barricade, Courtesy de l’artiste. © Dinh Q Le

Infos pratiques

Théâtre Raymond Devos
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Yaël Hirsch
Co-responsable de la rédaction, Yaël est journaliste (carte de presse n° 116976), docteure en sciences-politiques, chargée de cours à Sciences-Po Paris dont elle est diplômée et titulaire d’un DEA en littérature comparée à la Sorbonne. Elle écrit dans toutes les rubriques, avec un fort accent sur les livres et les expositions. Contact : [email protected]

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