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La « Matière noire » de Borondo prend d’assaut le Marché aux Puces à Marseille

La « Matière noire » de Borondo prend d’assaut le Marché aux Puces à Marseille

31 October 2017 | PAR Melissa Chemam

La Galerie Saint-Laurent, située en plein milieu du Marché aux Puces de Marseille, accueille depuis le 7 octobre et jusqu’au 31 janvier, un exposition / résidence passionnante. L’occasion pour Borondo d’interagir avec un lieu hors norme de cette ville en pleine évolution, et de collaborer avec le génial Edoardo Tressoldi, également exposé en ce moment à Paris au Bon Marché… Mélissa Chemam s’est rendue sur place et a ensuite interviewé les deux artistes à l’origine de ce projet.

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Cet événement est d’un genre rare dans la métropole méridionale française ! « M A T I E R E N O I R E » a permis à un groupe d’artistes européens de mettre en place une forme d’expression artistique incarnée, en interaction avec un lieu traditionnel et populaire, le Marché aux Puces de Marseille, situé au cœur d’un quartier délaissé de la ville, derrière un centre d’accueil pour migrants…

Mené par l’artiste Borondo (de son nom complet Gonzalo Borondo, né en 1989 à Valladolid), ce groupe d’artistes espagnols et italiens, tous amis et collaborateurs réguliers, s’est vu donner carte blanche par la galerie Saint-Laurent pour occuper son immense bâtiment situé en plein cœur de ce marché pendant trois mois. Leur but : interagir avec le lieu, ses boutiques et ses brocanteurs. Borondo a confié la direction du projet à l’Espagnole Carmen Main et travaillé étroitement avec son ami italien Edoardo Tresoldi. Tous se sont illustrés ces dernières années par un travail artistique libre, loin de la scène commerciale, et ambitieux. Un exemple : « Animal », la précédente exposition de Borondo à Londres, en 2016 (voir ici )

Le principal sujet de M A T I E R E N O I R E selon l’artiste : « tout ce qu’on ne peut ni voir ni détecter directement, mais qui permet néanmoins à l’univers d’exister : une métaphore de l’invisible à notre perception ».

L’exposition est gratuite et s’étend sur une superficie de 4 000 mètres carrés où Borondo présente son univers à travers plus de trente œuvres d’art – animations, hologrammes, installations, peintures, vidéos. Elles sont entourées par celles de huit aux artistes multidisciplinaires internationaux « appartenant à la dernière génération ayant grandi avant le boom digital », comme ils se définissent eux-mêmes : BRBR Films, Carmen Main, Diego López Bueno, Edoardo Tresoldi, Isaac Cordal, Robberto Atzori, Sbagliato, Momo, et A.L. Crego.

La liberté qui les a guidés a donné une réflexion sur notre interaction quotidienne avec les objets et avec notre réalité, d’où une interrogation autour de la « matière noire », visible ou invisible, tangible ou intangible, autour de nous. Les artistes utilisent des techniques mixtes, alliant des objets trouvés sur le marché à des photographies, vidéos, sculptures, etc. Véritable création d’art public, le spectacle en images, objets, sons et lumières, est divisé en trois parties (Projeter / Percevoir / Interpréter) sur deux étages.

« En février, Gonzalo m’a demandé de collaborer au projet, et nous sommes allés visiter le Marché aux Puces », raconte Carmen. « Là, nous avons découvert tous les trésors qui y reposent ! Je crois qu’il n’y a pas d’autre moyen d’intervertir un espace comme celui-ci, à part en travaillant avec les locaux pour préserver leur identité. Les objets et les souvenirs qui les accompagnent sont un matériau incroyable, et les personnes qui le font vivre sont essentielles ».

Le but de Carmen est devenu d’organiser une exposition qui dialoguerait avec le lieu et les locaux, en les impliquant dans l’expérience. « La majeure partie de notre Univers est faite de matière noire, que nous ne pouvons pas voir. Nous avons utilisé cela comme une métaphore pour comprendre que notre perception, et donc notre réalité, sont limitées. Il y a beaucoup de réalités que nous ne connaissons pas, mais sans eux, notre vie ne serait pas ce qu’elle est » ajoute la jeune femme. « Pour explorer cela, il était crucial d »inviter différents artistes, pour apporter des perspectives uniques ».

Gonzalo est quant à lui tombé amoureux du lieu au premier coup d’œil. « L’atmosphère, les objets, les masques, les bijoux… Tout permettait de créer un dialogue, dans une sorte de limbes de souvenirs. Cela m’a inspiré une réflexion sur notre ‘anima’, notre âme, sur la condition humaine et sur le rôle des objets dans notre société. Et j’ai invité des artistes à venir mêler leur langage au mien ». Momo, brocanteur franco-algérien installé dans le marché depuis des décennies, a aussi été invité à participer au projet. « On a vu en lui, qui est présent tous les jours depuis tant d’année, l’âme de ce marché »… Ayant débuté dans l’art de rue en tant que « muraliste », Borondo est inspiré par des espaces publics pour créer un art en constante évolution, non commercial et interactif.

Le résultat : une réflexion sur les différentes réalités humaines au niveau culturel, social et générationnel et sur les moyens qui permettent de les assimiler, des premières formes de représentation jusqu’aux plateformes digitales contemporaines. Pari réussi, donc, à l’univers déconcertant qui remet en question le regard du spectateur, dans une ambiance sonore et visuelle recherchée.

« Pour moi, construire des expériences qui soulèvent des questions est la partie la plus intéressante », insiste Carmen. Pour permettre au spectateur de voyager où il peut se sentir. Pour y arriver, il faut faire une immersion dans l’endroit, avec un concept né sur place. Le processus et comment y arriver est mon principal moteur. Le partager avec d’autres artistes est parfois plus difficile, mais c’est définitivement plus riche ».

L’ouverture du 7 octobre a attiré des centaines de personnes. La plupart des pièces étaient en vente ; certains sont même encore disponibles.Voir la page Facebook.

La galerie organise aussi une “N O C T U R N E“, le jeudi 2 Novembre jusqu’à 22h30, en présence de l’artiste Gonzalo Borondo pour une dédicace du livre d’Art et catalogue de l’exposition.

visuels : affiche de l’expo

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Melissa Chemam

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