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A la découverte de trois musées du Valais [Carnet de Voyage]

A la découverte de trois musées du Valais [Carnet de Voyage]

19 March 2018 | PAR Yaël Hirsch

Alors que Musée d’Art de Sion et le centre d’Art le Pénitencier ont été retenus en 2018 pour le titre de meilleurs musées d’Europe, Toute La Culture était dans le Valais, à la rencontre de trois Musées : à Lens et à Sion. Un séjour où marche, montagnes et art nos ont éblouis.

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A environ une heure de Lausanne, vint minutes de la fameuse Fondation Gianadda de Martigny (lire nos articles) et en dessous de la station de ski Crans-Montana, Sion est avec Sierre une des deux grandes villes du Valais. Ce dimanche 18 mars, un grand nombre de valaisans étaient réunis à l’orée de la ville fortifiée et de la Montagne, tous portant un bonnet rouge pour soutenir la candidature de leur canton aux prochains jeux-olympiques. C’est dans cette atmosphère festive et familiale que nous avons pu visiter deux musées de la ville aussi impressionnant que surprenant.

Le Pénitencier, d’abord, finissait avec entrée libre une grande exposition « En Marche ». Un sujet qui avait beaucoup plus à voir avec le mouvement des montagnards qu’avec la mouvance politique d’Emmanuel Macron. Comme son nom l’indique, ce Musée s’est logé depuis l’an 2000 dans une ancienne prison qui fonctionnait encore en 1998. Sur trois étages avec un grand puits central ouvrant toutes les possibilités de jeux de regards, c’est donc dans les couloirs et les anciennes cellules que l’on accède aux œuvres. Murs blancs, escaliers d’époque en colimaçon joliment retapés et impression d’espace et d’air libre plutôt que d’enfermement, ce Pénitencier se tient étrangement aux antipodes de la sensation d’enfermement que peut procurer la Conciergerie de Paris ou le Punta della Dogana à Venise. Et à l’intérieur, l’exposition « En Marche » séduit : Sous le mot d’ordre « Faire un pas, c’est faire un choix », et des citations sur la marche plein des escaliers, cette construction conceptuelle à la fois solide et enjouée nous enjoint à mettre un pied devant l’autre pour contempler des sculptures de Richard Long ou Douglas Gordon, des vidéos de Fischli & Weiss, des planches de Gustave Doré et Felix Vallotton ou encore des photos d’Emile Gos ou Joseph Beuys. Le tout nous emmène en voyage et à pied, donc, d’abord sur les chemins d’un mythe local : celui de la Montagne, la fascination qu’elle exerce, ses bienfaits et ses dangers. Il y a ensuite le mouvement intérieur. Puis petit à petit marcher se politise, et c’est toute une histoire de la conquête, de la chute et aussi du mouvement commun du peuple – qu’il s’agisse d’obéir ou de désobéir que l’exposition nous propose. Un parcours réfléchi, cohérent et parsemé d’œuvres très connues ou à découvrir qui se terminait malheureusement le 18 mars mais qui ouvre de belles attentes pour les prochains événements au Pénitencier.

A quelques mètres de l’ancienne prison, c’est installé dans l’ancienne forteresse que le Musée d’Art du Valais permet de voir sur deux fois quatre étages les trésors de l’art local et des collections internationales acquises par le Canton. Sur le chemin, par les fenêtres, es échauguettes et aussi le long des deux grandes plateformes qui permettent d’entrer dans le musée ou d’accéder d’une tour à l’autre, c’est tout le relief de la Montagne et des vignes du Valais qui s’offre au regard. Ce regard sur le paysage est d’ailleurs au cœur de l’excellent accrochage des collections permanentes qui, depuis 2016, sait jouer à la fois de l’Histoire de l’art locale et du contraste des temps pour nous donner à sentir en 150 pièces (sur 6000) la richesse et l’assise de ses collections. Capable de nous mener à la découverte de l’Ecole de Savièse (sorte de Pont-Aven local fondé au tournant du siècle par Ernest Bieler où l’on retrouve des noms importants pour le Valais comme le peintre ethnographe Raphaël Ritz ou les portraits de Marguerite Burnat-Provins, comme les photos du photographe contemporain Yann Gross, posées en vis-à-vis comme une percée dans les temps, les monumentales sculptures de passage de Olivier Estoppey ou les œuvres Valentin Carron, qui s’inspire du Valais pour ses installations et qui a représenté la Suisse à la Biennale de Venise en 2013. Dans l’accrochage thématique et pertinent, l’on retrouve aussi des œuvres internationales signées aussi bien par Ferdinand Holder, Marina Abramovic, Claude Viallat, Germaine Richier ou Alighiero Boetti. Enfin « Au quatrième » permet de découvrir des artistes locaux avec des expositions temporaires. En ce moment le lauréat du prix Manor 2017 (grand supermarché local), Eric Philippot a reconstitué un carnotzet, c’est-à-dire une pièce fermée que l’on trouve dans les fermes du Valais, où l’on peut cuisiner ce qui sent, comme la raclette ou a fondue, sans odoriser toute l’habitat. Prévoyez deux bonnes heures pour ce tour magnifique dans un lieu majestueux, à la découverte des collections et des artistes locaux.

Enfin, en montant vers Crans-Montana, nous nous sommes arrêtés dans un troisième Musée important : le Centre d’Art de la Fondation Pierre Arnaud, à Lens. Magnifique bâtiment de l’architecte Jean-Pierre Emery, ce Centre est perché sur une étendue d’eau au milieu de ce village du Valais, la Fondation a été créé par le mécène Daniel Salzman. L’Indigo, son restaurant aux grandes baies vitrées, tenue par le chef Mathieu Moreau (conseillé par Philippe Rochat) est prise d’assaut, notamment le week-end. Et ses deux expositions annuelles mettent souvent en avant le travail passionné d’un collectionneur sur une thématique donnée (voir nos articles sur les expositions précédentes). Alors que ce lieu magnifique a annoncé sa fermeture pour le 21 mai 2018, faute de solutions de financements, c’est avec un sentiment d’urgence et de tristesse que nous avons vu sa dernière exposition (jusqu’au 20 mai). « Art Aborigène, territoire du rêve » présente en deux étages et de manière géographique, en fonction du lieu où vivent et créent certaines tribus (Arnhem, Kimberley, côtes, déserts…), puis selon certaines thématiques (Rêve, Serpent Arc-en-ciel) 112 œuvres majoritairement issues de la collection privée Bérengère Primat. Une exposition qui rassemble des pièces importantes d’art aborigène, auquel l’Europe s’est intéressée dès les années 1880 et qui fascinent et se collectionnent de plus en plus, avec dans l’exposition des œuvres qui vont jusqu’à 2017.

Trois musées, donc et donc trois raisons d’aller faire un tour dans le Valais avant la fonte des neiges.
Visuels : YH

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Yaël Hirsch
Co-responsable de la rédaction, Yaël est journaliste (carte de presse n° 116976), docteure en sciences-politiques, chargée de cours à Sciences-Po Paris dont elle est diplômée et titulaire d’un DEA en littérature comparée à la Sorbonne. Elle écrit dans toutes les rubriques, avec un fort accent sur les livres et les expositions. Contact : [email protected]

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