Arts
Embarquement pour le Vietnam au Musée Cernuschi

Embarquement pour le Vietnam au Musée Cernuschi

Après avoir consacré une exposition au Japon à travers des rêves de laque, le Musée Cernuschi s’installe en territoire vietnamien. Du Fleuve Rouge au Mékong, Christine Shimizu et Loan de Fontbrune explorent les interactions entre les artistes vietnamiens et français, depuis la fin du XIXème siècle.  Un voyage franco-vietnamien coloré où des laques et couleurs sur soie côtoient des gouaches et des peintures à l’huile.

A l’instar des pays du Maghreb qui, au début du XIXème siècle, fascinèrent les artistes romantiques et académiques, l’Indochine française fut, à la fin du XIXème siècle, une source d’inspiration prolifique pour les artistes voyageurs. Charles Fouqueray, Géo-Michel, André Delacroix ou encore François de Marliave s’adonnaient ainsi au dessin d’une pagode d’Hanoï ou au portrait exotique d’un autochtone. Les gouaches et sanguines d’André Maire ne sont pas sans rappeler les couleurs criardes et irréalistes de Paul Gauguin, tous deux en proie à un retour aux origines. C’est une Asie fantasmée que peignent ainsi les artistes français, cherchant au Vietnam un moyen de renouer avec leur nature primitive.

Mais au-delà d’un simple modèle iconographique, le traitement formel allait être l’objet d’importants échanges artistiques, favorisés par la fondation en 1925 de l’Ecole des beaux-arts de l’Indochine : les artistes français tel qu’Alix Hava expérimentèrent la laque poncée et le fond doré, quand les artistes vietnamiens se formèrent à la peinture à l’huile et à la perspective linéaire. Lê Huy Miên est le premier artiste vietnamien à expérimenter la peinture à l’huile à l’occasion de son séjour à l’Ecole des beaux-arts de Paris. La peinture sur soie quant à elle, connaît un regain d’intérêt à l’ouverture de l’Ecole des beaux-arts de l’Indochine. L’exposition souligne ainsi un paradoxe fondamental : c’est une école française qui a favorisé le développement de la peinture sur soie, élément majeur de la peinture vietnamienne moderne. Nous découvrons ainsi un pays qui, à défaut de ne posséder que peu d’éléments artistiques propres, est riche d’un mélange culturel considérable provenant d’Asie (Chine, Japon) et d’ailleurs (France).

Le Musée Cernuschi nous propose une exposition originale, en choisissant de présenter une civilisation, dont un rapport direct avec notre histoire pouvait être tissé. Le Vietnam, habituellement plus étudié pour ses guerres et régimes politiques que pour sa production artistique, réveille ainsi notre propre art français du tournant du XIXème au XXème siècle. Le spectateur se remémore la finesse d’exécution, la palette mate aux nuances harmonieuses des Nabis, les folles arabesques de l’art nouveau, et cette fascination persistante de l’exotisme cher à Paul Gauguin. Chapeaux coniques, bols de riz ou éventails : le Musée Cernuschi nous convie à un véritable voyage en terre vietnamienne, où la France n’est jamais loin et où l’art rayonne par sa pluralité culturelle.

 

Crédits photo :

Nguyen Phan Chanh, La sorcière, couleurs sur soie, 63.5 x 87.5 cm, 1931, Ancienne collection Pierre Massé, coll. particulière © Christian Murtin

Mai Trung Thu, Deux jeunes filles, couleurs sur soie, 68.5 x 48.5 cm, 1942, coll. particulière © Christian Murtin

Mai Trung Thu, Mélodie, encre et gouache sur soie, 34.5 x 19 cm, 1956, coll. particulière © Christian Murtin

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