Arts

« Cheyne, 30 ans d’édition de poésie », à l’Orangerie du Jardin du Luxembourg – jusqu’au 31 juillet

19 July 2010 | PAR Marie Lesbats


Créée en 1980 par Jean-François Manier et Martine Mellinette, la maison d’édition s’est implantée au lieu-dit « Cheyne », tout près du Chambon-sur-Lignon, en Haute-Loire, Auvergne.
Est-ce grâce à cet isolement, cet « écart raisonné » que Cheyne a développé son savoir-faire, sa singularité, sa foi dans la conception – création – de ses ouvrages ? A l’occasion de l’anniversaire de ses 30 ans, le Sénat l’a invité à investir l’Orangerie autour d’une grande exposition qui retrace le parcours atypique d’une maison d’édition authentique.

L’Orangerie, cette immense salle sous verrière de 600 m2, a trouvé en Xavier Zwiller le metteur en scène idéal pour cet événement inédit. Constituée en plus de 6 mois, la scénographie est entièrement artisanale. De la conception graphique aux choix typographiques, du mobilier en bois à l’accrochage de ces voilages blancs suspendus sous la serre, le clermontois Xavier Zwiller a su donner à cette grande exposition tout le prestige que le lieu impose.
L’espace central de 240 m2 est baptisé « Cheyne : un temps pour la création, un temps pour le public ». Il fait entrer le visiteur dans la sphère intellectuelle et identitaire de la maison d’édition et illustre la volonté de favoriser les échanges avec les auteurs, traducteurs et autres acteurs – peintres, graveurs, ébénistes, céramistes… La petite équipe éditoriale composée de cinq personnes crée chaque année une dizaine d’ouvrages dans l’intimité d’une ancienne école rurale, sorte de « maison-atelier » qui serait – pourquoi pas – à mettre en lien avec les bateaux-ateliers utilisés par les peintres de l’eau du XIXème siècle… Tout cet affairement pour satisfaire l’exigence d’un lectorat gourmet et lui offrir des rencontres en librairies – environ 300 en France depuis 30 ans – et des festivals, rythmés par l’élogieuse lenteur de Lectures sous l’arbre.
Dénommée « Bâtir », la surface de gauche est dévolue à la présentation du catalogue de Cheyne, à ses collections et à son histoire. Se déroulent sur les cimaises extraits littéraires et citations de poètes ; s’y côtoient les noms des auteurs phares tels Jean-Marie Barnaud, Marie Cosnay ou Jean-Pierre Siméon. Des totems conçus par le scénographe fractionnent le recueil en catégories : collection enfants, collection historique, collection verte, succès de Matin Brun
Les 150 m2 restants intitulés « Faire lumière » présentent les outils ou objets d’atelier nécessaires à la création des livres. Les choix de la typographie au plomb, de la collaboration étroite avec les artistes peintres ou les relieurs, s’imposent comme les clefs de fabrication artisanale – et quasi artistique – de la maison Cheyne. Indépendance, donc. Intellectuelle, mais aussi commerciale et financière. Un art du livre, au service de la poésie contemporaine.
L’espace d’exposition est enrichi d’un documentaire commandé au vidéaste Jean-Louis Le Tacon, qui élude l’aventure de Cheyne.

Riche de plus de 300 titres et toujours soucieuse de découvrir ou suivre de nouveaux auteurs, Cheyne édite cette poésie  que nous aimons, avec lyrisme et beauté, dans un écrin ciselé. Au-delà d’une excellence aujourd’hui reconnue, au-delà de la qualité de ses ouvrages et de son art d’imprimer, au-delà de ses engagements, de son histoire et de sa place singulière dans une campagne esseulée, la maison Cheyne détient ce truc en plus. Ce « plus », c’est sans nul doute une âme. Cette âme qu’Yves Bonnefoy dépeint en ces mots dans la préface de Cheyne, 30 ans, 30 voix : « Une maison d’édition née, j’imagine, sans grands moyens, sans cuiller d’argent dans la bouche, riche seulement de l’allant de quelques personnes, mais qui a grandi, vaillante, intelligente, sensible. »

Cheyne éditeur – site internet

Cheyne, 30 ans d’édition de poésie“, Orangerie du Sénat, Jardin du Luxembourg
Du 12 au 31 juillet, ouvert 7/7 jours de 10h à 20h, entrée libre
RER Luxembourg/ Métro Odéon

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Marie Lesbats

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