Medias

Le fail d’Hadopi : conflits à gauche toute

13 June 2012 | PAR Ariane Kupferman Sutthavong

La nomination de Pierre Lescure, ancien PDG de Canal + à la tête d’une mission de concertation sur la loi Hadopi (“une quoi?”) a jeté un pavé dans la cyber-mare… Et causé pas mal de remous parmi la classe politico-médiatique du gouvernement de Jean-Marc Ayrault. Hadopi vs. Acte II de l’Exception Culturelle, retour sur un énorme chaos.

Dans une France déchirée par la campagne présidentielle, le candidat socialiste François Hollande annonçait – au milieu de débats de haut niveau sur la viande halal et le permis de conduire – sa volonté ferme de supprimer la loi Hadopi. (Petit rappel pour les newbies : Hadopi, le truc qui ne fonctionne pas trop mais déclenche des avalanches de tweets “Ça y est, je suis un pirate : j’ai reçu le mail d’Hadopi !”).

Son alternative? L’acte II de l’exception culturelle qui développerait, à la fois en cinéma et en musique, une “offre légale permettant de lutter contre la contrefaçon commerciale tout en cherchant de nouvelles sources de financement” auprès d’acteurs de l’internet, dit Aurélie Filippetti. Soit.

Deux mois sont passés, nous avons changé de président mais le problème reste le même. A la distinction que la gauche possède désormais les moyens d’agir sur la question : mais dans quel sens? “Abrogation”, “révision”, “remplacement”, les mots fusent et les acteurs eux-mêmes ne semblent plus rien y comprendre.

Juan Branco, ex-collaborateur d’Aurélie Filippetti durant la campagne et aujourd’hui absent du Ministère de la Culture, a manifestement développé une certaine aigreur vis-à-vis du gouvernement, n’hésitant pas à transformer son compte Twitter en véritable mur des lamentations.

L’auteur de Réponses à Hadopi enchaîne, en 6 x 140  caractères, sur les raisons qu’il pense être responsables de son écartement : “Elle [Aurélie Filippetti] croit pouvoir se débarrasser sans frais de ceux qui inquiètent les lobbys.” La menace Branco, terreur des groupes de pression, revendique également la paternité de l’Acte II de l’exception culturelle qui tournera, selon lui, en “boucherie”. Il n’hésite, par surcroît, pas à confier les diapositives du projet original au journal en ligne Mediapart, doublant ainsi la ministre.

Un projet qui pourrait ne pas voir le jour? Si l’affectation de Pierre Lescure à cette concertation a été saluée par la Société des Auteurs et des Compositeurs dramatiques comme “le choix d’une expérience indiscutable”, on ne sait pour le moment pas ce qui en ressortira. Demeurent également les problèmes d’agenda… D’ailleurs, y en a-t-il un?

Fleur Pellerin, déléguée à l’économie numérique est contredite par Aurélie Filippetti : à quelques heures d’intervalle, l’une annonçait le lancement de la concertation avant l’été et lui prévoyait une durée d’au moins six mois tandis que l’autre réfutait clairement “toute logique de calendrier”. Décidez-vous, bon sang.

Heureusement que la charte de déontologie des membres du gouvernement stipule que “l’expression, directe ou    indirecte, de désaccords ne peut qu’affaiblir le gouvernement et susciter le scepticisme des citoyens à l’égard de la crédibilité de l’action politique“. Sinon, on ne saurait vraiment plus où donner de la tête.

Visuels :

Aurélie Filippetti : (c) Didier Plowy/MCC
Capture d’écran du compte Twitter.

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Ariane Kupferman Sutthavong

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