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La face B d’Agnès Varda : la Nouvelle Vague

La face B d’Agnès Varda : la Nouvelle Vague

25 January 2013 | PAR Justine Braive

Mais qui est donc Agnès Varda ? L’exposition d’Aix en Provence dans le cadre de Marseille Provence 2013 Capitale Européenne de la Culture permet de mesurer qu’Agnès est une photographe et une plasticienne exceptionnelle. Mais Agnès a également une face B, presque aussi importante que sa face A…

Sa face B, ce sont ses 40 années consacrées quasiment exclusivement au cinéma. Face A et face B se répondent, son travail de plasticienne étant nourri des portraits réalisés lorsqu’elle était photographe et de ses courts et longs métrages. Agnès Varda aurait certainement souhaité qu’on parle d’une face C, découpant sa vie professionnelle en trois, photographe, cinéaste et plasticienne.

Si vous ne pouvez pas vous déplacer à Aix en Provence pour admirer photos et vidéos d’Agnès Varda, peut être aurez-vous la possibilité de visionner « Tout(e) Varda », impeccable coffret de 22 DVD qui regroupe ses œuvres complètes. Ce coffret revient sur toutes les facettes créatrices de l’artiste, de la photographie à ses débuts à ses activités les plus récentes en tant qu’artiste plasticienne. L’artiste affirme en effet avoir eu « trois vies professionnelles », celle d’un photographe, d’un cinéaste, d’une plasticienne. Agnès Varda se dit donc désormais artiste, sa “troisième vie” qu’elle n’est pas prête d’arrêter pourtant âgée de 84 ans, et multiplie les expositions et installations, en Chine, à Venise, à la Fondation Cartier et dernièrement Aix en Provence dans le cadre de Marseille Provence 2013 pour célébrer les Bouches-du-Rhône.

Si vous ne connaissez Agnès qu’en tant que « jeune plasticienne », sachez donc qu’elle est aussi « une vieille cinéaste » selon ses propres dires.

Remontons quelques décennies en arrière. Dans les années 50, Agnès travaille comme photographe au Théâtre national populaire dirigé alors par Jean Vilar. Dix ans plus tard, montée à Paris, elle est l’une des seules femmes à prendre part à la Nouvelle Vague. Son premier film « la Pointe courte » avec Philippe Noiret se déroule à Sète, où elle a débuté en tant que photographe. Agnès Varda photographiait une famille de pêcheur tout en notant leurs propos. Ce n’était plus seulement leurs images qui lui plaisaient mais également « les matières, les détails, le vent dans les draps ». En réalité, Agnès s’apprêtait à devenir cinéaste, aimant également « les mots et les dialogues ». Pour « quitter le silence des portraits immobiles » et « aller vers des voix, ses sons, du mouvement et de la musique », Agnès  écrit son premier scénario. Ce film s’annonce comme précurseur de ce que sera la Nouvelle Vague. Sans le vouloir, elle devient très vite une figure pionnière du cinéma. Cinq années plus tard, elle produit « Cléo de 5 à 7 », un film sur une chanteuse à la plastique superbe et mortellement malade. Certainement l’un des films emblématiques de la Nouvelle Vague. Commence alors une longue période de 40 ans pendant laquelle elle se consacre presque exclusivement au cinéma et acquiert une réputation mondiale…

La décade suivante, la voilà à Los Angeles où elle produit un film hippie-hollywoodien  « Lions Love » après les événements de mai 68 sur la naissance de la contre-culture en Californie, le rejet de la guerre du Viêt-Nam, la culture flower power, le mouvement hippie. Sa période  hollywoodienne ne s’arrête pas là, elle tourne en 1979 et 1981 deux documentaires. Elle emmène la rock star Jim Morrison sur le tournage de Peau d’âne, de Jacques Demy, son compagnon.  Au gré des tournages, Varda se lie à de quasi-inconnus promis à un brillant avenir, Alain Resnais, Chris Marker, Harrison Ford, Gérard Depardieu.

Mais au détour des années 2000, bien que largement septuagénaire, la voilà qui revient à la photo. Mais cette fois-ci, elle pratique la photographie d’une manière différente. Elle l’introduit dans ses installations où elle mêle objets divers, vidéos et images fixes.

Si Agnès a quitté le cinéma traditionnel depuis quelques années, c’est pour éviter le combat auquel se livrent les nombreuses sorties du mercredi. Le film de son fils Mathieu Demy « Americano » sorti en salles en 2011, devait concurrencer une vingtaine d’autres créations. Elle ne souhaite plus se replonger dans cette compétition, cherchant d’ « autres façons de s’exprimer que dans les films dits de cinéma ». Elle préfère désormais réserver son talent aux musées, “moins brutaux” que les aléas du box-office.

Mais en réalité, Agnès découpe  sa vie professionnelle ainsi pour « des facilités de compréhension » alors que « ces trois vies se superposent ». C’est ainsi que pour une de ses dernières installations, les « Veuves de Noirmoutier », les 14 vidéo-portraits entourant l’image centrale réalisée par Eric Gautier, sont tournées par l’artiste elle-même. Selon elle, « il y a [ses] trois vies créatrices en une, trois façons de travailler qui se rejoignent et se répondent ».

De même, la photographie prise en 1956 sur la terrasse de la Cité radieuse de Le Corbusier a inspiré à Agnès Varda un projet mélangeant photo et film une vingtaine d’années plus tard. Varda interroge le rapport entre l’image fixe et l’image animée. Elle s’est amusée à prolonger cette photo en film, pour imaginer sa réalité cachée en mouvement. Cette transition lui parait évidente entre l’image fixe et l’image animée. Ces deux univers sont liés, la photo immobile passe à l’action. Agnès s’empresse alors de donner corps aux personnages en faisant appel à des acteurs.

Par ces allers- retours entre sa pratique de la photographie et son métier de cinéaste, Agnès Varda traduit son obsession de relier le passé et le présent.

Agnès Varda  multiplie les « faces ». La dernière en date, Agnès Varda cuisinière. Vous pourrez trouver, glissée dans une pochette surprise entre les nombreux DVD du coffret, la recette de son plat préféré, les côtes de blettes au gratin.

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Justine Braive

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