Cinema
Berlinale : Gold, le seul film allemand en compétition n’est vraiment pas une pépite

Berlinale : Gold, le seul film allemand en compétition n’est vraiment pas une pépite

09 February 2013 | PAR Olivia Leboyer

Cette année, un seul film allemand concourt pour l’Ours d’or et il est copieusement raté ! Un western d’une rare platitude, avec Nina Hoss (l’actrice de Barbara, en compétition l’an dernier). A fuir !

N’est pas John Ford qui veut. Dès le générique, kitschissime, où le nom des acteurs s’inscrit sur un lingot d’or, on prend peur. Éberlués, nous laissons se dérouler un western de pacotille, mollasson, presque inconvenant. La ruée vers l’or, les premiers pionniers débarqués au Canada, cela pouvait donner matière à un film ample et beau. Dans Gold, nous suivons donc l’expédition d’un petit groupe d’Allemands venus chercher fortune en Amérique. Parmi eux, une femme, belle et mystérieuse, Emily Meyer. Nina Hoss reproduit à l’identique sa performance déjà très appuyée de Barbara : la femme endurcie, fermée, incapable d’exprimer des sentiments dont on devine qu’ils ne demandent qu’à éclore… (pour cela, quelques roulements d’yeux humides font l’affaire). Tous les personnages se réduisent à un archétype : le reporter fat qui lorgne sur Emily ; le chef d’expédition, un bonhomme véreux à souhait ; deux vieux cantiniers sans malice ; un pauvre bougre qui espère procurer à sa famille nombreuse une vie meilleure ; et, bien sûr, un ténébreux cowboy, mutique lui aussi, aux faux airs d’Adrian Brody. Dans ces paysages grandioses, les pauvres acteurs ont presque l’air déguisés. La petite troupe chemine vers Dawson, sur des sentiers escarpés et dangereux. Les mésaventures se déroulent sans surprise, comme autant de perles sur un collier. Aucune originalité, aucune puissance du récit. Certes, Thomas Arslan entend prêter attention aux menus incidents de la vie quotidienne, aux silences, aux non-dits entre Emily et le beau palefrenier. Mais ces suggestions sont extrêmement lourdes. Gold suit avec fidélité les codes classiques du western, en les copiant sans style. Mon Dieu, que John Wayne nous manque ! Chignon impeccable, bien propre, et lèvres pincées, la valeureuse Emily traverse mille épreuves sous notre regard indifférent. A mesure que ce long film progresse, la grande histoire de la quête de l’or se resserre en une histoire intimiste. Un homme et une femme dans la nature hostile, prêts, enfin, à se confier l’un à l’autre, à échanger un peu de chaleur humaine. Mais cette romance parfaitement huilée n’a rien de bouleversant. Devant tant de platitude, on reste assez surpris. Récemment encore, en 2011, les frères Cohen ont avec True Grit livré un remake de Cent dollars pour un shérif d’Henry Hattaway, certes moins réussi que l’original (car sans John Wayne…), mais tout à fait plaisant. Ici, on se demande vraiment le pourquoi d’une telle entreprise : parvenir à réaliser en 2013 un western sans âme, qui reprend sagement les clichés sans jamais les revisiter d’une autre manière, est en soi un grand mystère.

Sur le sujet de la ruée vers l’or, mieux vaut lire le beau roman de Blaise Cendrars, L’Or.

Gold, de Thomas Arslan, Allemagne, 113 minutes, avec Nina Hoss, Marko Mandic, Uwe Bohm, Lars Rudolph, Peter Kurth. Sélection officielle, en compétition.

Patrick Orth © Schramm

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Olivia Leboyer
Docteure en sciences-politiques, titulaire d’un DEA de littérature à la Sorbonne  et enseignante à sciences-po Paris, Olivia écrit principalement sur le cinéma et sur la gastronomie. Elle est l'auteure de "Élite et libéralisme", paru en 2012 chez CNRS éditions.

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