Cinema

Sortie ciné : Âmes en stock

01 May 2010 | PAR Geraldine Pioud

Surréaliste et intrigant, Âmes en stock est une oeuvre de science fiction sans effets spéciaux. Sophie Barthes réalise un premier long métrage touchant et prometteur qui séduit autant par sa maîtrise que par ses petites maladresses.

Outre l’euphorie créatrice qui emporte sa réalisatrice (une boulimie de références qui offre une multitude de mises en image), on retrouve dans Âmes en stock une forme de naïveté intelligente, mettant finalement en perspective une grande maîtrise de la narration cinématographique. Sophie Barthes bouillonne d’idées, d’envies, mais surtout, elle aime le cinéma et cela transpire à chaque plan. Son histoire, elle l’a rêvée : une nuit, elle s’est vue en face de Woody Allen, dans une sorte de clinique rappelant les décors du 2001 : l’odysée de l’espace de Kubrick. Chacun tenait une boite dans laquelle se trouvait leur âme : pour quelles raisons on l’ignore, mais ils venaient d’en subir l’ablation. Puis Sophie se réveilla. Avec cette idée de film dans la tête.

Dans Âmes en stock, le pitch est presque le même. Paul Giamatti (qui a gardé son vrai nom pour ce personnage de fiction) incarne un comédien en proie à de nombreux doutes quant à ses interprétations scéniques. Il décide de se rendre dans une clinique qui propose l’ablation et le stockage des âmes. Dépourvu de cette partie, certes invisible mais ô combien encombrante, Paul Giamatti espère donner un nouveau souffle à son jeu. Assez vite pourtant le comédien réalise que sans son âme, son jeu d’acteur n’a plus du tout la même saveur. Tout se complique lorsqu’il demande qu’on la lui remette : l’âme est introuvable. Paul découvre alors qu’elle ne serait plus à New-York, mais en Russie, où le trafic d’âmes est monnaie courante.

Pour son premier long métrage, Sophie Barthes s’est amusée avec les courants artistiques dont elle se sent proche. À Paul Giamatti elle a donné un côté Woody Allen, dans l’aspect névrosé-intello new-yorkais qui porte sur lui les douleurs du monde ; à son histoire elle a offert une esthétique surréaliste très Cadavre exquis qu’aurait adoré les Bunuel, Dali et autre Prévert ; dans ses dialogues on retrouve le côté absurde des Beckett et Ionesco, si bien que, nous aussi, nous attendons toujours Godot en compagnie de La cantatrice chauve : et, de façon inconsciente, elle a paré ses décors de l’univers de Kubrick (en particulier 2001 : l’odysée de l’espace pour la clinique et Eyes Wide Shut pour l’appartement du couple Giamatti/Watson). Tout ceci mais aussi Tchekhov, la Russie et les rêveries (on pense immanquablement à La vie est un songe de Calderon)… Un mélange gouteux, pétillant et hallucinatoire qui fonctionne, non pas par une formule magique (même si la plupart du temps la réussite ou non d’un film ne s’explique pas en terme binaire : il y a quelque chose de l’ordre de l’invisible et/ou du tour de passe-passe totalement inexplicable dans l’alchimie filmique), mais par un ingrédient unique que l’on pourrait appeler la Sophie Barthes ‘s Touch! Car déjà, dans son premier long métrage, la patte de la réalisatrice se dessine, et l’on peut assez facilement imaginer que, dans deux ou trois films, devenue précise et unique, cette fameuse patte soit reconnaissable entre toutes!

Afin de découvrir l’univers de la réalisatrice, vous pouvez lire notre interview.

Âmes en stock (Cold Souls), de Sophie Barthes, avec Paul Giamatti, Dina Korzun, Émilie Watson
Sortie en salles le 5 mai 2010

Infos pratiques

Billy Budd, la Bastille pour navire
Rencontre avec Sophie Barthes, réalisatrice de Âmes en stock
Geraldine Pioud

2 thoughts on “Sortie ciné : Âmes en stock”

Commentaire(s)

  • C’est aussi mon coup de coeur de la semaine. Et j’invite tous ceux qui ont l’âme imaginative à aller voir ce film. Si cela vous amuse vous pouvez jeter un coup d’oeil à mon blog sur le sujet! :D à bientôt

    May 7, 2010 at 19 h 07 min

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