Théâtre

Amélie Nothomb, Le fait du Prince

16 September 2008 | PAR marie

Le fait du princeCette année, le nouvel Amélie Nothomb risque de décevoir vos attentes. Les ingrédients classiques y sont – le ton et les personnages – mais manquent l’alchimie et l’épaisseur de l’intrigue. Dans Le fait du prince, l’écrivaine ne parvient pas à faire entrer le lecteur dans son univers. Les rebondissements paraissent trop voués à des hasards improbables. Pas du grand Nothomb, mais du Nothomb quand même.

On reste sur sa faim avec « Le fait du prince ». Amélie Nothomb a bien essayé d’enivrer ses lecteurs à coup de bulles de champagne, mais les bulles ont fait long feu. Il n’y a guère que ses personnages que la boisson conquiert. Le lecteur referme le livre avec une impression d’inachevé.

On commence l’ouvrage plein d’espoir, plongé directement dans le cynisme absolu de l’auteur : « Si un invité meurt inopinément chez vous, ne prévenez surtout pas la police. Appelez un taxi et dites-lui de vous conduire à l’hôpital avec cet ami qui a eu un malaise ». Un conseil saugrenu qui augure de la mésaventure qui arrive ensuite au personnage principal, Baptiste Bornave, qui se retrouve avec un cadavre sur les bras. Celui d’un homme, Olaf Sildur, venu mourir d’une crise cardiaque dans son appartement après une panne de voiture. Mais aussi son cadavre à lui, celui de son existence quand le décès de cet étranger en relève le non-sens.

Un farniente interminable

Baptiste Bornave décide alors de devenir Olaf Sildur. Il s’installe dans sa villa Versaillaise, auprès de sa somptueuse jeune épouse qui le prend pour un invité envoyé par un mari trop souvent en déplacements inopinés. S’en suit un farniente interminable dans l’habitation bourgeoise. Très vite on se demande ce qui va suivre, ce qui va arriver. On attend quelque chose qui nous fasse penser que le roman a commencé. Mais non, rien ne vient.

C’est peut-être l’art d’Amélie Nothomb, cette manière de tenir haletant le lecteur. Parce qu’il ne voudra pas lâcher le livre sans avoir compris pourquoi il le lit. Mais y a-t-il seulement un sens à tout cela ? La romancière choisi de garder pour elle les menus mystères qui sont les touches d’intérêt de son roman…

Pour les besoins de l’intrigue

Comme dans « Journal d’hirondelle » (2006), l’auteur compte sur les heureux hasards pour faire avancer son fil. Comme dans « Journal d’hirondelle », Amélie Nothomb choisit un homme médiocre qui se raconte lui-même. Et l’incohérence est toujours là. Comment, un homme aussi petit, aussi médiocre que Baptiste Bornave, un individu qui n’a aucun sens et aucune épaisseur au début du livre peut-il, tout d’un coup – pour les besoins de l’intrigue – acquérir une profondeur d’esprit et une capacité de réflexion impressionnante. Tout à coup, il manie les mots avec une dextérité d’écrivain.

Les amateurs d’Amélie Nothomb qui, à chaque rentrée littéraire, attendent le nouvel opus, sauront peut-être se repaitre du « Fait du prince ». En somme, tous les ingrédients y sont : la plume aiguisée mais sans fanfreluche, l’intrigue qui met mal à l’aise, et les personnages alambiqués. Il ne manque que l’essentiel : l’alchimie qui ferait tenir tout ça.

Erreur de casting ?

Mais pas sûr que ses ultras fidèles ne se demandent pas si cet ouvrage n’est pas une erreur de casting. On se demande pourquoi, parmi les trois livres qu’Amélie Nothomb écrit chaque année, elle a choisi de publier celui-là et de vouer les deux autres manuscrits à l’oubli.

Le malaise qu’on ressent en refermant le roman ne pousse pas vraiment à se demander si l’effet était voulu. On s’attend à mieux que ça, à plus dérangeant, à quelque chose de moins linéaire, à un encéphalogramme moins plat pour l’intrigue.

Ce n’est pas l’ouvrage qu’on conseillera aux néophytes de Nothomb, mais on attend quand même l’opus de l’an prochain parce qu’on veut retrouver du vrai Nothomb, de « L’hygiène de l’assassin » ou des « Combustibles ». Du cynisme à bon escient.

Amélie Nothomb, « Le fait du prince », Albin Michel, 15.90€

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marie

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